mercredi 25 juillet 2007

Un Mai dans une gargotte au sud

En attendant rien, dans cette petite gargotte d'Algarve, café-cognac à jeun pour cette douce stimulation des neurones au matin ou cette dilatation du coeur, comme on voudra.
Je regarde, tranquille, caché par le flot vomissant des touristes rouges brique venus du nord. Gras, sucrés et mous. Pauvres hères esclaves d'un monde dont ils ignorent tout. Ils jouissent un peu - et souffrent un peu aussi, comme tout un chacun - dans le labyrinthe étriqué de leur existence, sans danger immédiat. À chacun son histoire, ses petites passions, ses petites raisons au marché où tout le monde se rencontre.
Gitans noirauds, vieux portugais creusés des rides de leur terre, commerçants avides, sympas, hollandaises en culotte courte, comme ces anglaises et leurs conjoints - en un seul mot - sous-produits inconscients d'une tare dans l'évolution planétaire.
J'ai beaucoup tenté de glaner une étoile dans un regard mais le sirop trouble des globes oculaires ne luit même pas à l'éclat du soleil pourtant puissant.
Ah! Ces bons éléphants dans la chaleur de l'Afrique et dans leurs bains de boue. Et ces grands primates offrant facilement la bonté dans un regard.
Et pourtant, à côté, mille quatre cent centimètres cube de cervelle malade pour infecter aussi bien les rues des mégalopoles que les déserts jadis vierges pour des super marathon en Nike à faire - pour finir - palpiter le coeur moins vite mais pas forcément mieux.
Tu vois le tableau : tu chiales, tu ris et tu ne comprends pas grand-chose à ces douleurs et ces joies sans lendemain. À quoi bon ?
Alors,« je vas te dire », pour citer un dragon barbu de ma connaissance :
« Tu touches des doigts et de la paume la surface lisse du comptoir, tu prends ton verre à pied avec trois doigts et tu le soulèves jusqu'à la hauteur de tes yeux. Tu laisses passer le rayon de lumière à travers le liquide ambre foncé, puis tu bois de bon coeur en frôlant de tes lèvres un peu tristes le bord de cette coupe magique. Tu m'oublies, tu t'oublies. Rappelle-toi alors de tout. Je veux dire respire tout, la douleur, la connerie, la joie de bon coeur et en appréciant le nectar.»
Le geste est précis, harmonieux, guérisseur. Incroyable, non ?


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