lundi 5 mai 2008

La plaine est vide


Seul au milieu de nulle part, sous les nuages dansants de la plaine où soufflent tous les vents, je continue ce périple commencé il y a mille ans. Ou bien un instant, comment savoir ?
D'ailleurs je m'en fiche, je ne suis qu'un voyou parfois touché par la grâce, cette douceur venue je ne sais d'où qui s'empare et dicte tout.
Les vents me bousculent comme les rêves me poussent et je suis impuissant en grignotant chaque pas, espérant une rencontre, une outre d'eau-de-vie, une nuit sous la tente dans l'ivresse réjouie, les mains calleuses se passant le bol toujours rempli...
L'air est pur,les cîmes sont proches et voilà un canyon au fond duquel roulent des eaux furieuses. Et, chance, un pont de fer suspendu avec sa lourde puissance surgît telle une invite insistante à passer...
Tout balance et l'orage gronde, tandis que la foudre se met à tomber, des grêlons menaçants claquant sur les chaînes du pont...
Renégat, voleur, lâche individu, je m'attends au pire sur le pont du destin où mes pas trébuchent. Ha ! Qu'importent mes états d'âme devant l'implacable dieu dont la gueule ouverte signifie mon congé de ce monde...
Mais il s'efface parmi éclairs et grondements tandis qu'un vieil homme au ventre large, puissant, apparaît dans cette tourmente, au bout de ce pont de chaînes emmêlées...
Toutes mes paniques, mes peurs, mes horreurs se transforment en larmes et je tombe à genoux aux pieds du solitaire au haut chignon blanc...
Quand j'ouvre les yeux, apaisé, plus personne, un ciel immaculé et des neiges bien plantées sur leurs sommets parfaits...
Je me relève un peu lourd mais le coeur plus léger. Mon sac et ma canne comme complices, mes pas m'entraînent vers ce nulle part de toutes les aubes, de l'impérial festin, de l'amour qui tout engloutit comme un ogre explosant de bonté, vers le regard aperçu un instant qui brûla tout pour laisser vivre...
Et je ahane, piètre guignol sous les astres, encore un pas, puis un autre mais je ris sous ma barbe de poils mi-roux, du ridicule ainsi exposé par cette mienne carcasse et cet esprit trouble...La vie est si belle mon gars

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mille ans c'est peu, camarade, mais c'est vrai qu'il n'y a plus de milieu et heureusement. L'étreinte est encore du possible des nigelles, un soir de juin avant que les promoteurs ne construisent le malaise des petites gens. S'il y a orage l'étreinte sera encore plus belle. Avec les lucioles. Avec quelques cris de jouissance (toujours imparfaite car on y reconduit la vie). On ne t'a pas signifié ton congé. C'est à toi de voir. Et ce chignon, celui de ta mère, n'est qu'espoir.