lundi 8 octobre 2007

Couac


Tout semblait se tenir mais il n'avait pas vu cet oiseau bizarre dressé sur le tabouret, en attente d'un évènement que nul autre n'aurait pu inventer.
Le bar jouissait des ombres du petit matin, dans cette crasse arrosée d'eau pour mieux écraser les poussières sur le plancher.
Sobre, il ne voulait rien et s'était posé comme le passant regarde une vitrine, assis devant les verres vides et les cadavres de la nuit.
L'oiseau d'un coup d'aile disparut. Que signifiait cet augure ?
Un frisson lui fit comprendre : une ombre encore plus sombre le regardait du fond de cette pièce vivant aux seuls reflets des bouteilles alignées.
Dehors l'océan s'agitait un peu pour mieux lécher la plage.
L'ombre s'avançait découvrant un visage sublime et des pommettes brunes sous un regard que les cils n'osaient interrompre.
Elle était belle, inimaginable, unique comme un coup de couteau. Il se croyait contemplatif, il se trompait. Blasé, le choc fut encore plus violent.
Elle s'assit, la reine de ces lieux déserts, lui toucha la main du bout de ses ongles parfaits. Une telle douceur irradiait de ce contact qu'il n'en respirait plus. Alors, il sut. Et cette découverte insensée ne pouvant être traduite il ne put qu'expirer son dernier râle d'ignorant. Une inspiration plus tard il renaquit au grand jour - ou à la grande nuit d'ailleurs, quelle importance? - sa solitude s'étant magiquement dissoute dans cette féminité impossible. Ses tatouages virils lui couraient sur la peau, derniers vestiges d'une autre vie.
Ils se levèrent après un long moment et sortirent goûter le sable avec leurs pieds ailés. Puis ils disparurent dans la beauté des nuages.

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