jeudi 5 novembre 2009

Le gadjo ne peut éteindre sa soif d'absurde

Ce monde où le cheval n'est présent qu'en boucherie ou sur des champs de courses, ce qui m'apparaît comme identique aujourd'hui ,va vite, très vite. Trop vite. Le gadjo ne sait plus goûter les joies simples, il s'est enfermé dans de gigantesques centres de détention où quelques uns, il est vrai, jouissent de faveurs particulières. Mais en règle générale, nous vivons une "civilisation d'enchristés". Je ne peux mieux dire. Le tsigane - je parle du vrai, du gitan, du voyageur éternel pour qui ne comptent que la famille et le ciel qui la guide - possédait une rare qualité : la faculté d'adaptation à n'importe quel système, au gré de ses rencontres, tout au long de siècles d'errance.
Mais là, vingt et unième siècle de cette chronologie inventée, ça devient un peu trop fort, un peu trop bitumé et les traditions s'effritent pour ne pas dire qu'elles ont déjà disparu.
Il ne reste alors que quelques voyageurs égarés, solitaires. Cependant, obéissant à la loi millénaire du "brouillage des pistes", leur esprit intact est quelque peu protégé par les oripeaux et l'attitude de pauvre idiot qu'ils affichent volontiers, inspirant une vague pitié ou un mépris certain aux contemporains rencontrés.
Ils passent inaperçus et c'est tant mieux : ils sont trop rares et leur unique possession, la science de la vraie liberté, est trop précieuse pour être transmise n'importe comment et à n'importe qui.
Par amour, ils gardent le secret, laissant ici et là quelques miettes aux affamés dont les dispositions d'un jour ou d'un soir permettent une certaine ouverture, une écoute authentique par ce qu'il leur reste de cœur et d'intelligence.
les derniers voyageurs sont des veilleurs qui se montrent très rarement. Lorsqu'ils le font c'est en entier, sans rien garder caché. Ils transmettent, c'est leur vie, leur don, leur dernière raison de ne pas rejoindre les plaines secrètes dessinées dans les cieux.
J'en avais rencontré un, je l'avoue et l'ai reconnu bien tard. mais les bribes qu'il m'avait laissées, je les ai reconstruites pour voir et comprendre son enseignement. J'ai d'ailleurs fini par le retrouver le vieux voyageur, un jour par hasard (le terme me fait bien rire mais il faut bien utiliser le vocabulaire n'est-ce pas ?). C'est là que mon voyage a réellement commencé. Je sortais de cinq ans de légion passés au Deuxième Étranger d'Infanterie et j'errais dans les rues de Paris...
( à suivre...)

1 commentaire:

le cinglé a dit…

On ne peut rien comprendre si l'on n'a pas vécu la terreur.