lundi 19 octobre 2009

Désespoir bon marché ou non-espoir branché


Comme parfois pour le marin, l'horizon avance vers toi en épaisses nuées de plomb, l'air est lourd, la menace imminente, tu es seul sur ton quarante pieds ( ou douze mètres si tu veux, plus ou moins ), sans énergie, déjà épuisé par des nuits de lutte. Il ne reste plus qu'à faire front. L'attente est vaine d'espoir, tu es soûl d'impuissance, tous les instruments de communication à bord sont brisés. C'est "l'œil du cyclone", ou comme tel : pas de vent, silence de mort...
Deux options, en gros : la panique qui procède du désespoir logique face à l'inéluctable, morne panique ou crise hypnotique. Tu es comme plaqué sur le pont ou abattu dans le carré.
Ou bien le calme face à cette terrible beauté, cette merveille de l'océan et du ciel conjoints dans l'immense. Pas de peur, pas de pensée mais une prière qui monte, s'amplifie, se mêle aux courants dans l'air et dans la mer, une présence au danger avec dévotion envers le sublime. Plus rien ne compte...Ta tranquillité est terrible. Existes-tu encore dans ce sombre tableau ? Oui, plus que jamais. Seules les petites choses ont disparu. les petites peurs, les petits égoïsmes, les petites pensées, les choses infirmes...
Alors, même ton épuisement sera félicité, amour tendre au milieu de la violence qui se prépare et les premières brises, comme de premières salves, te fouetteront les sangs.
Tu sais, mon gadjo, le gitan n'est pas trop amoureux de navigation. Il existe cependant des circonstances où rien ne se passe comme tu l'avais planifié et l'homme des chevaux peut se retrouver au milieu des eaux furieuses.
Après tout, dans ton esprit, n'est-ce pas un peu pareil ?
Le nomade, ton ami de toujours, ne sait même plus s'il pose les pieds quelque part, la douleur est trop forte de voir l'espace se transformer en prison pour tous ces perdus sans dieux purs. L'air irrespirable, les sons violents, brutaux, les paysages si laids. Il est difficile de voir la beauté du monde, certains jours.
Il n'attend rien depuis longtemps ton frère nomade, il ne peut que regarder tant que son cœur bat encore le tempo de la promenade...

1 commentaire:

le cinglé a dit…

N'oublions pas que dans ce genre d'aventure on ne peut dormir qu'une seconde sur la crête de la vague, mais au bout du compte ce sommeil ajouté bout à bout est une prière, je veux dire quelque chose qui se nomme confiance et qui, aussitôt, réclame de la lucidité et je vais même dire de l'humour. Oui, humoresque. Il nous est arrivé aussi d'éclater de rire comme en ivresse, jamais déçu de cette folie à quoi nous aspirons en dehors du monde petit-bourgeois.